Dans son livre consacré à la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, « L'Aube, le soir ou la nuit » (éd. Flammarion), l'auteur Yasmina Reza, qui a suivi le patron de l'UMP avec son accord durant douze mois, révèle les propos que ce dernier a tenus en apprenant que son directeur de campagne lui avait concocté une visite du Cross (Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage en mer) Corsen à Plouarzel le 1er mai 2007, quelques jours avant le second tour de l'élection présidentielle :
« Qu'est-ce qu'on va foutre dans un centre opérationnel sinistre à regarder un radar ? Qui a eu cette idée de demeuré ?... Je me fous des Bretons. Je vais être au milieu de dix connards en train de regarder une carte ! (...) »
Ces propos, qui ont été très maladroitement démentis par l’Élysée le 25 août auprès de la rédaction du Télégramme de Brest, en dépit des témoins de la scène, y compris des responsables de l'UMP, qui les avaient déjà confirmés, appellent plusieurs commentaires.
– En premier lieu, les Bretons ne peuvent rétrospectivement que se féliciter d'avoir, le 6 mai, largement rejeté le candidat Sarkozy en lui accordant moins de 47 % de leurs suffrages (à noter que ce rejet vaut pour la Loire-Atlantique aussi bien que pour la Bretagne dite administrative). Ils avaient pressenti que le candidat de la droite était de la même veine qu'un Charles Pasqua qui, au soir du référendum sur le traité de Maastricht, découvrant que la Bretagne venait de voter OUI à 60 %, avait chantonné devant les journalistes : « Les Bretons, c'est comme les cochons... ». La morale de l'histoire c'est que la droite française a décidément un problème avec les Bretons ; les psychanalystes parleraient d'une fixation. Les électeurs bretons l'ont bien compris en confirmant leur rejet de la droite aux élections législatives de juin.
– En second lieu, les propos que Sarkozy a tenus le 1er mai au Cross Corsen trahissent un mépris pour le sort des gens de mer et le monde maritime d'une façon générale et font peser plus qu'un doute sur la sincérité de la démarche de celui qui, devenu président de la République française, s'est déplacé à Plouescat le 22 août pour assister aux obsèques du patron-pêcheur du « Sokalique » Bernard Jobard, décédé en mer dans la nuit du 16 au 17 août après une probable collision avec le cargo Ocean Jasper immatriculé aux îles Kiribati. D'ailleurs l'attitude complaisante de Nicolas Sarkozy devant les gestes indécents d'une partie du public qui s'était déplacé à Plouescat comme on va au spectacle, avait déjà suscité un sentiment de malaise.
– Ensuite, force est de constater que la presse parisienne a massivement passé sous silence l'extrait du livre de Yasmina Reza qui soulève tant d'émotion en Bretagne. Alors que le quotidien anglais plutôt conservateur The Times, lui, n'a pas manqué de relever le propos. Dans la presse parisienne dite nationale, seule la chaîne de télévision M6 lui a donné un écho. Or le livre de Yasmina Reza a fait l'objet d'une très large couverture médiatique. Ce silence interpelle car il est bien évident que si le candidat Sarkozy, devenu président, avait tenu des propos du genre « Je me fous des Parisiens », nous aurions eu droit à un scandale national.
– Sur le fond des choses l'« affaire Sarkozy » doit être traitée de façon non pas émotionnelle mais politique. Elle doit ouvrir les yeux à ceux de nos compatriotes qui s'en remettaient encore au bon vouloir du pouvoir parisien pour régler leurs problèmes.
Nos cousins celtiques d’Écosse et du Pays de Galles avancent à grands pas sur le chemin de leur émancipation, refusant la société d'inégalités et de violence qui se répand en Angleterre, et obtiennent déjà une représentation directe au sein des institutions de l'Union européenne.
S'inspirant de ces exemples, les Bretons doivent avoir collectivement le courage de se prendre en mains pour acquérir les moyens de se gouverner eux-mêmes et de préserver les valeurs de solidarité et d'ouverture au monde qui caractérisent la société bretonne et, accessoirement, ne plus jamais subir l'affront d'un personnage indécent qui, bien que n'ayant jamais reçu la légitimité du suffrage universel en Bretagne, entend disposer de son destin. Ce chemin-là n'est pas le plus facile, mais c'est celui de la liberté et de la dignité, le seul qui nous vaudra enfin le respect des dirigeants que les Français se choisiront. C'est à Rennes, à Brest et à Nantes que se construira l'avenir des Bretons, pas à Paris.
Pour l'UDB, la porte-parole, Mona Bras membre du Conseil régional de Bretagne
Par délégation, Christian Guyonvarc'h, vice-président du Conseil régional de Bretagne
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