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- Interview -
ABP interviewe Frederig ar Bouder

Frederig ar Bouder (Frédéric Bouder) est né à Paris en 1970. Son grand-père Glazik l'initie au Breton, et sa grand-mère flamande lui donne le goût de la langue de

Philippe Argouarch pour ABP le 28/04/09 2:44
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Frederic Le Bouder

Frederig ar Bouder (Frédéric Bouder) est né à Paris en 1970. Son grand-père glazik l'initie au Breton, et sa grand-mère flamande lui donne le goût de la langue de Vondel. Il passe une partie de son adolescence en Irlande et reçoit une éducation trilingue Anglais- Français- Allemand. Il pratique le violon, le rugby et l'aviron. Le diplôme de Sciences-Po en poche, il part étudier le droit en Allemagne. Puis, il est pendant sept ans administrateur à l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique) où il travaille en étroite collaboration avec le Conseil de l'Europe et les Nations Unies sur les questions de décentralisation, de fédéralisme, de lutte contre la corruption et de développement durable. Il s'installe à Londres en 2003, où il occupe un poste de chercheur au King's College London. Docteur en philosophie (PhD), il est un expert reconnu des questions de santé et d'environnement et a une dizaine de publications à son actif. Il a rejoint le parti ADSAV en 2004 et en est devenu le Président en janvier 2008.

[ABP] En tant que patriote breton, comment analysez vous la situation de la Bretagne aujourd'hui ?

[Fredrig ar Bouder] Je considère que la Bretagne est à la croisée des chemins. D'un côté les Bretons se réveillent : l'Etat français est en pleine déconfiture, nous sommes plus conscients que jamais de notre personnalité nationale distincte. D'un autre côté nous sommes menacés par l'assimilation et l'extinction dans le magma français.

[ABP] Quels sont les urgences pour préserver la nation bretonne d'une disparition totale ?

[FAB] La France, en sortir c'est s'en sortir ! La mise en place d'un Etat breton indépendant devient urgente. Sans République bretonne nous n'aurons pas les moyens de faire face aux enjeux du monde actuel. Notre langue ne sera sauvée que par une politique linguistique ambitieuse, que seul un Etat indépendant pourrait mettre en œuvre. Notre économie ne sera sauvée que par un changement de cap qui place la Bretagne au centre et non à la périphérie. Le néo-colonialisme actuel conditionne les transferts de population, nous rend plus vulnérables aux délocalisations et étouffe l'initiative. Un peuple qui accepte de sortir de l'Histoire n'a pas d'avenir. Sans moyens de se gouverner lui-même il se condamne à être un figurant, il étouffe.

[ABP] Le fait que vous travaillez et résidez en Angleterre depuis six ans, ne vous handicape t'il pas pour analyser et comprendre la situation sur le terrain en Bretagne ?

[FAB]Ma vie est un éternel retour, j'ai un pied sur chaque rive de la Mor Breizh. C'est une tradition d'ailleurs bien ancrée chez les patriotes bretons. Cette situation m'ouvre des perspectives qui nourrissent ma réflexion et mon action. Par exemple je peux suivre de très près les initiatives des députés gallois, comme l'actuelle proposition de loi visant à étendre l'usage du gallois à tous les aspects de l'Etat-civil. Les comparaisons avec la situation de la Bretagne ne sont que plus édifiantes.

[ABP] Que pensez vous du fonctionnement de la démocratie en GB ? et en particulier la reconnaissance du pluri-culturalisme ou la reconnaissance des nations que forment le Royaume Uni, ou encore la dévolution ? La monarchie constitutionnelle n'est-elle pas plus adéquate pour reconnaitre plusieurs nations au sein d'un même état ?

[FAB] Les Anglais n'ont pas l'obsession de l'assimilation qui caractérise l'Etat français depuis toujours et sous toutes ses formes : Louis XIV ne fut pas meilleur que les sans-culottes! Même au temps de l'apogée de l'Empire britannique les Anglais n'auraient jamais osé dénier leur personnalité nationale distincte aux Ecossais, Irlandais ou Gallois. Je ne connais pas d'équivalent à cette confusion typiquement française entre nationalité et citoyenneté. Le problème ne vient pas tant des choix constitutionnels entre république et monarchie que de la nature profonde du système français. L'Etat unitaire français se considère comme début et fin de toute chose ce qui rend illusoire toute démarche régionaliste ou fédéraliste dans le cadre de l'Hexagone.

[ABP] Pourquoi vous êtes vous engagé à ADSAV plutôt que dans un autre parti breton ? quel est votre parcours politique ?

[FAB] Je n'ai pas vraiment de parcours politique. Je me suis intéressé au mouvement breton depuis l'adolescence mais sans jamais trouver aucune « chapelle » suffisamment sérieuse pour m'engager. J'ai souvent croisé, soit des romantiques débridés et sans projet concret, soit de bien sages tenants du « cul entre deux chaises » faisant abstraction des rapports de force entre la Bretagne et l'Etat français. En 2003 j'ai rencontré les militants d'Adsav, je suis allé au congrès annuel du mouvement, l' impression fut des plus positives et j'ai franchi le pas.

[ABP] Vous êtes, depuis le 9eme congrés d'adsav, devenu le président de ce parti, quelles directions vous entendez donner à ce parti ?

[FAB] Je m'inscris dans la continuité de la direction fixée en son temps par mon prédécesseur et désormais Président d'honneur, Padrig Moutauzier. Le « mouvement breton » a perdu trop de temps entre son nombrilisme, ses luttes intestines, ses pratiques groupusculaires, il fallait créer autre chose, et ce fut le premier grand succès d'Adsav. Pas de fausse modestie, je pense que nous sommes les seuls à avoir rompu avec les tares de la division. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous attirons autant de Bretons « ordinaires » sans aucun passé militant. Mon ambition est de permettre l'émergence d'un puissant parti indépendantiste comme en ont tous les peuples sans Etat. Un mouvement au service du peuple breton dans son ensemble et pas un cercle de militants coupés de la société. Sans pour autant tomber dans la démagogie qui consiste à flatter les dérives d'une société de plus en plus francisée. Notre rôle est au contraire de montrer l'exemple, de promouvoir l'idée bretonne, afin de rendre les Bretons à la Bretagne.

[ABP] ADSAV se situe où sur l'échiquier politique breton ?

[FAB] L'échiquier politique breton n'existe pas encore, ou alors il n'est que le reflet de l'échiquier politique français. La francisation de notre sphère politique est si poussée que chaque parti français semble avoir son appendice régionaliste breton. Les anarchistes et trotskystes, le Parti socialiste et les Verts, le MoDem-UMP, et depuis peu, jusqu'aux résidus du FN et du MNR. Rien ne manque au tableau! Chaque courant de pensée française a son petit satellite qui à l'occasion espère être reçu à la table du maître pour recevoir quelques miettes ; sous la forme d'un poste d'adjoint au maire ou d'une place en fin de liste. Adsav rejette cette logique débilitante, c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il s'attire les foudres de ceux qui se sont engagés sur la voie de la collaboration. Nous nous situons au dessus et en dehors du système français. C'est la seule manière d'avancer, c'est la seule méthode qui ait fait ses preuves à l'étranger.

[ABP] Êtes vous un parti indépendantiste ? pro-Europe ?

[FAB] Je suis pour une Bretagne indépendante dans une Europe aux Cent drapeaux. Je reprends ici l'expression de Yann Fouéré. Cette Europe aux Cent drapeaux je la vois comme une Union Européenne réformée en profondeur et dont les Peuples-nation (Bretons, Irlandais, Danois, Basques) seraient l'épine dorsale au lieu des Etats-nation actuels. L'Europe politique est en panne parce qu'elle repose sur des Etats abstraits et fonctionne (mal) par le truchement d'une bureaucratie tout aussi abstraite. Mon projet vous semble bien idéaliste ? Peut-être, mais les idées font avancer le monde. J'ajourerais que l'indépendance de toutes les petites patries charnelles encore privées d'Etat ne fera que contribuer à donner corps à ce projet.

Deux précisions subsidiaires. Je suis également favorable aux alliances régionales comme un Conseil Celtique dans le domaine culturel, ou un Arc Atlantique dans le domaine économique. D'autre part l'adhésion de la Turquie à l'Union Européenne signerait l'arrêt de mort de tout projet européen qu'il s'agisse de l'Union dans sa forme actuelle ou de l'Europe aux cent drapeaux.

[ABP] Acceptez vous le pluralisme démocratique et l'existence d'autres partis bretons qui auraient une vision du passé ou du futur différente de la votre ?

[FAB] Je n'ai jamais fait appel à faire barrage à un parti ou un courant d'opinion. C'est aux partis français et leurs appendices régionaux qu'il faudrait poser la question de la profondeur de leur engagement démocratique. Je regrette le manque croissant de "fair play", le développement du sectarisme et les bassesses qui ne sont que le reflet de l'immaturité du système politique français transposé à la Bretagne. Je suis favorable à davantage de vraie démocratie, au lieu de la mascarade actuelle. J'espère qu'une fois libérée, la Bretagne se dotera d'un système qui, comme en Suisse, permet aux citoyens de faire entendre leur voix de manière directe. Un système vraiment démocratique permet de combattre les idées plutôt que les personnes.

[ABP] Quels sont les autres partis nationalistes de minorités européennes dont vous vous sentez proche ou avec les quels vous avez des relations ?

[FAB] Lorsque j'ai pris mes fonctions de président d'Adsav l'une de mes premières initiatives a été de contacter de nombreux partis européens, certains avec qui Adsav avait déjà eu des relations, d'autres pas. Les réactions ont été inégales et marquées par une triste réalité : l'échiquier politique de l'Hexagone, du Royaume-Uni, de l'Espagne ou de l'Italie l'emportent souvent sur ce qui devrait rassembler l'ensemble des partis nationaux. Il fut un temps ou l'union sacrée était de mise, dans des contextes plus difficiles et moins politisés qu'aujourd'hui. Je regrette cette époque.

Si je me sens à priori proche de toutes les forces qui luttent pour l'émancipation nationale, cela ne m'aveugle pas pour autant. Lorsque le Plaid Cymru invite des représentants Cubains à l'une de ses réunions parlementaires ou lorsque le Vlaams Belang s'affiche avec le Front National français je ne peux m'empêcher de penser que cela dessert la cause nationale. Mais je ne me permets pas pour autant de juger. Pep den mestr en e di; pep pobl mestr en e vro (Y-V Perrot). Chaque homme maître en sa maison, chaque peuple maître en son pays. Je me dois de citer la Lega Nord qui a montré un grand intérêt pour notre combat, et nous a donné accès à ses relais et médias pour promouvoir la cause bretonne. Ce qui est appréciable, puisqu'il s'agit d'un poids-lourd actuellement au pouvoir. Des Adsaverion assistent régulièrement aux congrès du Voorpost flamand, et réciproquement. Il s'agit d'un groupe d'action et non d'un parti. Son engagement contre la francisation de la région bruxelloise force le respect.

Attention, la Bretagne est une nation privée de son Etat et pas une « minorité » ! Contrairement aux Alsaciens par exemple qui, stricto sensu, sont une minorité germanophone en hexagone.

[ABP] vous dites dans votre FAQ, ADSAV n'est ni libéral ni anticapitaliste, vous êtes quoi alors ?

[FAB] L'idéologie libérale réduit l'individu à un simple homo economicus sans attaches et dont le seul objectif serait de maximiser son profit immédiat sans se soucier du lendemain. L'anticapitalisme se nourrit de l'illusion d'une société sans échanges marchands, ce qui revient en pratique à promouvoir un étatisme absolu. Ces utopies ont un point commun : elles réduisent l'homme à sa seule dimension matérielle. Dans les deux cas cela nous conduit dans le mur : il suffit de regarder le bilan du modèle français qui combine les pires défauts des deux systèmes. L'homme n'est pas isolé, il vit en société. De plus il a des aspirations spirituelles et morales. Un modèle économique viable doit prendre en compte ce délicat équilibre entre le bien de l'individu, y compris immatériel, et celui de la société. En somme, il s'agit de pratiquer un modèle plus coopératif. Des théories de « l'ordo-libéralisme » en passant par la doctrine sociale de l'Eglise, les outils ne manquent pas pour aider à la réflexion sur les applications pratiques d'une vision coopérative. Le fait qu'elles soient méconnues en Hexagone ne doit pas faire perde de vue que les approches coopératives sont à la base de l'économie sociale de marché telle qu'elle se pratique en Europe du Nord.

[ABP] On reproche a ADSAV de ne pas condamner clairement et catégoriquement les prises de position ,pro-nazi du PNB, du moins de celui recréé par Olier Mordrel en juillet 1940. Notamment dans votre FAQ vous écrivez "ADSAV ! se refuse à condamner ceux qui ont combattu pour l'indépendance bretonne avec sincérité et droiture, quelles que soient l'époque et les circonstances.". S'il est juste de distinguer les hommes des idéologies, pourquoi ne pas alors condamner clairement le choix malheureux du deuxieme PNB de s'allier à l'occupant allemand ?

[FAB] Pendant la seconde guerre mondiale des nationalistes bretons se sont retrouvés dans tous les camps. Quels que soient les choix des uns et des autres, l'immense majorité des nationalistes ont maintenu en toute circonstance une attitude chevaleresque qui tranche avec l'indécence de comportement généralement observée en France. La vérité c'est que la Bretagne a eu trop de martyrs et pas assez de bourreaux et que c'est justement ce qui dérange. Françoise Morvan, dont les idées sont à l'opposé des miennes, a bien montré comment le « mouvement breton » se dérobe lâchement dès qu'on lui demande d'aborder son Histoire. Ces Bretons savent au fond d'eux qu'ils n'ont rien à reprocher à leur pères spirituels, mais ils préfèrent courber l'échine par peur du scandale et des cabales. C'est une position dangereuse qui engendre la schizophrénie. Et qui ne rapporte rien puisque les ennemis de la cause bretonne ne respecteront pas les faibles.

[ABP] Olier Mordrel , le co-fondateur du PNB, qui certes a écrit certains textes sur l'histoire de France intéressants et toujours actuels, et de qui ADSAV se réclamme souvent, avait adopté dans sa revue Stur, des principes national-socialiste et racistes. D'autre part, après la guerre il a rejeté en bloc dans un de ses denier livres, "l'idée bretonne" je crois, les Droits de l'Homme. Reconnaissez vous les droits fondamentaux de l'homme, tel que définis par l'ONU et Europe et en particulier, la liberté religieuse, la liberté d'expression ? ou remettez vous en cause ces droits universels ?

[FAB] Comme homme politique, la première chose qui m'intéresse ce sont les analyses et les éclairages qui permettent de nourrir ma réflexion. Bien des analyses d'Olier Mordrel n'ont pas pris une ride! Je recommande à tous la lecture du « Mythe de l'Hexagone » qui démonte totalement les impostures de l'Histoire dite “de France”, ainsi que la « Voie bretonne » qui prévoyait les dérives de l'Emsav. Pour le reste, savoir si des propos politiques qui datent de 80 ans ont été plus ou moins raciste-et-fasciste que ceux de Churchill, Patton, De Gaulle ou Tintin au Congo n'a aucun intérêt pratique. Juger une époque avec des références actuelles serait une imbécilité sans nom dont se gardent bien les historiens sérieux. En ce qui concerne votre dernière question sur les droits de l'homme je n'ai pas en tête ce qu'Olier Mordrel a écrit sur le sujet. Je vous livre ma position: je préfère parler de droits « individuels » et non « universels », car il faut bien reconnaître que seule une minorité de pays au monde prend la question au sérieux. Le respect de l'individu et de ses libertés sont au coeur de la civilisation celtique. Comment pourrais-je y être opposé? Mais l'individu n'est pas tout. Chez nous les droits des peuples comptent aussi, car les Bretons sont d'incorrigibles « communautaristes ». Il faut faire en sorte de combiner le respect des individus et celui des peuples au lieu de les opposer. Or il existe une tendance dangereuse en Hexagone visant à sacrifier tant les peuples que les personnes sur l'autel en trompe loeil de droits de l'Homme abstraits.

[ABP] Dans la question 17 de votre FAQ, vous dites que les Verts sont des imposteurs... Vous n'allez pas un peu vite pour démoniser un parti politique qui a fait avancer des tas de législations européennes pour protéger l'environnement? Démoniser les autres n'est ce pas justement ce que vous prétendez être la victime de la part d'autres partis?

[FAB] Allez simplement faire un tour sur le site internet des Verts ou lisez une leurs professions de foi. On y parle surtout de tiers-mondisme, de manifestations en faveur de clandestins etc. Il serait d'autant plus logique de se renommer les «Rouges » au lieu des « Verts » que les implications de certaines positions, par exemple l'ouverture massive des frontières, auraient un impact environnemental désastreux. En ce qui concerne l'environnement êtes-vous bien certain que les initiatives des Verts aillent si souvent dans le bon sens? Qu'il s'agisse de l'énergie, des produits chimiques ou d'autres sujets j'y vois surtout du dogmatisme : pour les éoliennes, contre les produits chimiques, contre les OGM etc. On ne va jamais trop dans le détail des avantages et des inconvénients, on encense ou on stigmatise en bloc. Ce qui est à l'opposé d'une démarche raisonnable sur des questions complexes.

[ABP] Vous présentez maintenant des candidats aux élections et vous avez obtenu des résultats pas pire que les autres partis bretons aux dernières élections cantonales et municipales, comment expliquez vous ce succès relatif ?

[FAB] Pour un jeune parti qui se présente à une première élection je dirais que nos résultats ont été excellents. Une moyenne assez homogène qui frise les 5% sur six cantons répartis sur l'ensemble de la Bretagne; 6,3% à Lamballe et des pointes à 12% et 13% de voix dans certains bureaux de vote. Ces résultats sont d'autant plus significatifs qu'ils ne sont imputables à personne d'autre. Nous ne faisions pas de figuration sur les listes d'un parti français et ne faisions partie d'aucune alliance, ni bien entendu n'avons reçu aucun encouragement d'aucun parti…Plutôt des peaux de bananes! C'est donc un vote d'adhésion sur notre seul nom et notre seul projet. Pour avoir parlé à plusieurs électeurs et à de nouveaux adhérents venus à nous par le biais de ces élections, j'interprète ce résultat comme le fruit de cinq facteurs principaux: nous avons un vrai projet ; nous analysons les sujets sous l'angle de l'intérêt breton ; nous abordons les questions sans langue de bois ; nous aimons aller au contact des gens ; nos membres viennent de tous les milieux et sont donc à l'image de la société bretonne.

[ABP] Pourquoi présenter un candidat aux cantonales de Redon, alors qu'il y a déjà un autre parti nationaliste " le parti breton" qui se présente ? N'est ce pas diviser le vote nationaliste et amoindrir les chances d'avoir un élu ?

[FAB] Je ne suis pas la meilleure personne pour vous répondre sur la question de la division des voix puisque nous avons été le premier parti à annoncer, dès le 30 mars, notre présence à cette élection. Notre Kevrenn dans ce pays de Redon, où je me rends chaque année à l'occasion de la commémoration de Ballon, ne demandait qu'à relever ce défi. D'autre part nous avions les mains libres puisque nous avons fait le choix de ne pas nous présenter aux élections européennes du fait de cette scandaleuse circonscription « Grand Ouest » qui dilue le votre breton. La seconde candidature que vous évoquez est-elle une décision d'appareil ou l'initiative d'un individu ? Mystère. Mais ce qui est certain c'est qu'elle fut une surprise. En effet, j'avoue humblement ne pas avoir anticipé le fait que l'on puisse se présenter contre le maire dont on est l'adjoint et le proche alors même qu'on conduit son propre parti, le même dimanche, au casse-pipe européen… Oui je l'avoue, deux mandats et une petite trahison entre amis c'était au dessus de mon imagination !

Un petit point subsidiaire de vocabulaire. Si être nationaliste est compatible avec les doubles appartenances et les alliances opaques, s'il est admissible de se dire nationaliste tout en refusant «tout séparatisme » alors je préfère qu'on me qualifie d'indépendantiste. La réalité compte davantage pour moi que les étiquettes.

[ABP] Sur certaines de vos affichettes on peut lire "les Français dehors" n'est ce pas une position extrémiste ? La colonisation française est tellement accomplie qu'en Haute-Bretagne on ne peut souvent même plus distinguer un Breton natif d'un Français arrivé récemment en Bretagne. Si on vous écoutait, c'est une grande partie des Bretons eux-mêmes, devenus français de culture, qui devraient quitter le pays où ils sont nés ?

[FAB] Il n'existe aucune affichette d'Adsav où l'on puisse lire "les français dehors". Si une telle affiche existe, elle ne vient pas de nous. Il est contraire à notre déontologie de stigmatiser des gens en raison de leur appartenance. L'acquisition de la citoyenneté d'un Etat breton pourrait être étendue à des non-Bretons, bien entendu. Il s'agit d'ailleurs d'une proposition qui figure au programme de gouvernement breton d'Adsav. Il appartiendra au peuple breton d'en définir les modalités de manière totalement souveraine.

[ABP] Comment définissez vous la nation bretonne?

[FAB] Notre hymne national le « Bro gozh ma zadoù » signifie le vieux pays de mes pères. Il résume tout. On naît breton, japonais ou basque du fait de sa famille et quelque soit d'ailleurs le lieu de naissance. La qualité (ou le défaut) de breton se transmet donc par la filiation. Si certaines personnes ont perdu de vue cette réalité première c'est à cause de la confusion entre nationalité et citoyenneté est une particularité saillante du système français. Les Bretons peuvent être ou non des citoyens français, j'en connais d'ailleurs qui ne possèdent pas la citoyenneté française. Mais ce qui compte vraiment, ce qui fait qu'il existe encore une conscience de notre nationalité, c'est que beaucoup de Bretons se souviennent qu'un bout de papier n'est pas grand-chose au regard de l'attachement charnel au pays de nos pères.

[ABP] Merci d'avoir repondu a nos questions.

Philippe Argouarch

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Philippe Argouarch est un reporter multi-média ABP pour la Cornouaille. Il a lancé ABP en octobre 2003. Auparavant, il a été le webmaster de l'International Herald Tribune à Paris et avant ça, un des trois webmasters de la Wells Fargo Bank à San Francisco. Il a aussi travaillé dans des start-up et dans un laboratoire de recherche de l'université de Stanford.
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