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- Chronique -
Mouvements sociaux et crise économique
G.W. Bush a battu les sommets d'impopularité aux USA. Pourtant, jamais les citoyens américains ne sont descendus dans la rue pour bloquer leur propre pays. On peut être contre un gouvernement mais cela ne donne pas le droit de mettre en danger l'économie de son pays. (...) Une même vague d'espérance avait porté quelques mois plus tôt Nicolas Sarkozy au pouvoir alors que les Français désespéraient de pouvoir sortir notre pays de ses blocages chroniques. Mais il a fallu quelques mois pour que
Jean Claude Malaguti Par Economistes sans Frontières le 2/02/09 3:38

G.W. Bush a battu les sommets d'impopularité aux USA. Pourtant, jamais les citoyens américains ne sont descendus dans la rue pour bloquer leur propre pays. On peut être contre un gouvernement mais cela ne donne pas le droit de mettre en danger l'économie de son pays. Les Américains ont assumé leur choix électoral jusqu'au bout, sachant qu'ils auraient la possibilité de changer le moment venu. Aujourd'hui, un grand espoir se porte sur le nouveau président Obama tandis que l'alternance démocratique s'est produite dans un processus exemplaire pour le reste du monde.

Rappelons-nous qu'une même vague d'espérance a porté quelques mois plus tôt Nicolas Sarkozy au pouvoir alors que les Français désespéraient de pouvoir sortir notre pays de ses blocages chroniques. Mais il a fallu quelques mois pour que cette espérance se transforme en désillusions. On nous dit que la crise est passée par là comme si les mouvements de grève et les conflits sociaux dataient de l'arrivée au pouvoir de Sarkozy.

Nicolas Sarkozy a justement été porté par une vague bleue à l'Élysée, composée de l'immense majorité des Français qui sont fatigués de ces conflits et blocages systématiques sur fond d'appauvrissement structurel. Depuis 15 ans que je suis en poste à l'université, il ne s'est pas passé une année sans qu'une session d'examen soit perturbée par des conflits sociaux qui peuvent à tout moment dégénérer en blocage du campus. À chaque fois que j'invite des collègues étrangers ou que je participe à une conférence à l'étranger, j'ai la hantise d'une perturbation dans les transports publics, qui bloquerait mon invité dans un hall de gare ou d'aéroport. Telle est en tout cas la crainte exprimée par les collègues étrangers.

On nous dit que les deux tiers des Français approuvent ce mouvement social qui exprime un ras-le-bol général. Et alors ! Une majorité de Français a porté cette équipe au pouvoir. Quelle est la majorité la plus légitime ? Celle qui exprime dans les urnes ou celle qui s'exprime sur les ondes ou qui bat le pavé ? Une majorité de Français aimerait sans doute aussi pouvoir gagner sa vie sans avoir l'obligation de travailler. Mais la majorité ne fonde pas en toute circonstance la légitimité.

Le peuple français - ou ceux qui prétendent parler en son nom - est en conflit permanent avec son propre gouvernement, avec ceux qu'il met précisément au pouvoir, de sorte que notre pays se trouve dans une incapacité à être gouverné. Cette incapacité se traduit par une dérive des finances publiques que personne ne semble pouvoir stopper. On sait que l'issue d'un tel processus est la faillite de l'État, ce qui est toujours le prélude aux troubles intérieurs les plus imprévisibles.

Pourtant, la litanie anticapitaliste s'affiche dans tous les débats autorisés. « Rien ne peut moraliser le capitalisme », « le capitalisme ne se moralisera pas de lui-même » nous assènent les « experts » altermondialistes. Mais qui moralisera les moralisateurs ? Ils oublient de dire qu'il était interdit de critiquer le communisme dans les pays communistes alors que le capitalisme se tourne lui-même en dérision à travers des campagnes publicitaires ou la presse libre dont il permet l'épanouissement. C'est qu'il n'existe tout simplement pas de « système » capitaliste. Par contre, il existe une éthique du capitalisme - remarquablement analysée par Max Weber - dont on s'est dramatiquement écarté pour avoir ignoré les principes philosophiques et humanistes qui fondent le libéralisme.

« Le retour en grâce de Keynes va de pair avec la peur panique de voir les ménages épargner plutôt que consommer. Cela peut se comprendre ! Mais on se doit aussi de constater que le discrédit jeté par l'illustre économiste sur l'épargne, définie pour les besoins de la cause comme « l'excédent du revenu sur la consommation », est pour beaucoup dans les déviations, y compris financières, du capitalisme occidental. Schématiquement, l'esprit du capitalisme dont on s'est terriblement éloigné en Occident se résume comme suit. L'épargne individuelle est par la force des choses toujours à la source des fonds propres apportés aux entreprises (leur « capital »). Certes, l'épargne peut s'analyser comme une renonciation à consommer de la part de l'investisseur. Mais il s'agit d'une renonciation consistant à transférer aux dites entreprises un pouvoir d'achat multiplié – par les vertus de la rotation du capital – leur permettant d'investir et d'embaucher. Bref : de développer dans la société toute entière la consommation très au-delà du « sacrifice » de consommation consenti à la base par l'épargnant. Une économie capitaliste qui s'éloigne sur le fond de ce modèle cessera de l'être et s'appauvrira. C'est notre cas » [1].

Ce n'est pas parce qu'on ne connait pas des principes, qu'ils n'existent pas. Ce n'est pas parce qu'on ignore une chose, que cette chose cesse d'exister. De la même manière que l'on voudrait multiplier la sphère des droits tout en rétrécissant le domaine des devoirs au nom d'un « contrat » démocratique vicié, on a voulu consommer des richesses que nous ne sommes plus en mesure de produire, notamment en sacrifiant nos capacités d'investissement. Ce faisant, on a voulu accroître le niveau de vie de tous en brisant l'effort productif de chacun.

[1] Paul Fabra, « Épargner accroît la consommation », Les Échos, 20 janvier 2009

Jean-Louis Caccomo Perpignan, le 29 janvier 2009
(voir le site)
(voir le site)

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Vos 1 commentaires :
yves le mestric Le Mardi 31 août 2010 23:27
Comme les moustiques qui s'acharnent sur le lampadaire, croyant l'illusion de soleil car il ne savent pas ce qu'est un lampadaire, les dernières nouvelles confuses que la presse diffuse illustrent les manques de perceptions du monde en hexagonie. 1 - Le défi Obama 2 - Les anglos-saxons louent le dirigisme économique "à la française" (Le Monde 31/01/09) 3 - les troubles sociaux provoqués par la crises
1 - Ne voyant que le fait que M. Obama soit noir, la profusion d'articles sur la société américaine oublie tout simplement d'expliquer les valeurs qu'il a mises en avant: liberté, démocratie et opportunités pour nos enfants.
Liberté: droit individuel d'être ce que l'on est: en France on appelle cela pudiquement "diversité" mais on omet de décrire ce que cela implique - jacobinisme oblige.
Démocratie : la transparence à tous les niveaux de la société - diffusion de l'information. Et feedback des électeurs pouvant reprendre ce qu'il ont donné - expression de la souveraineté.
Opportunités pour nos enfants: la responsabilité des acteurs d'aujourd'hui est engagé lorsqu'ils cautionnent leurs gabégies en gageant les ressources à venir. Cela provoque l'incapacité d'une génération à pouvoir investir sur de nouvelles vagues car les moyens sont mobilisés (gaspillés) ailleurs.
2 - Une interview de Ch. Lagarde dans Newsweek suffit pour l'expression nationaliste française à justifier la pertinence des décisions gouvernementales. La presse parisienne omet de préciser que le journal a diffusé également un article dont l''auteur précise : "Si l'interventionnosime au coup par coup devient trop coutumier, le continent (européen) pourrait payer très cher les entraves à l'innovation et à la croissance. Et, lorsque les USA, plus flexibles, se seront remis sur pied, elle pourrait se trouver à nouveau dépassée".
3 - Mais que veulent les manifestants ? A voir les slogans, ils veulent la lumière du lampadaire. Personne ne réclame le soleil. Pourtant quelques articles de presse commencent à distinguer les pâles copies des ampoules au mercure de l'astre universel. Le très nationaliste Telerama précise à propos des assises de la presse : " l'information ne reflète pas la France décentralisée de 2009. Elle devient de plus en plus jacobine. Bientôt, on ne verra plus ques des images de Paris" (Erwan Desplanques). De même Courrier international , dans son edito de Philippe Thureau-Dangin indique le retour aux démons nationaux en France par " un jacobinisme renforcé du pouvoir qui plait bien à N. Sarkozy, malgré son libéralisme affiché".
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