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Un robot pour rédacteur en chef ?
Un robot pour rédacteur en chef ?
- Interview -
Robots dans la presse : Philippe Argouarch explique son rédacteur en chef virtuel
ABP a inventé le concept de rédacteur en chef virtuel en mettant au point un algorithme qui positionne les articles sur sa page d'accueil en fonction de leur popularité. La revue universitaire Terminal a publié un papier sur le sujet
Maryvonne Cadiou pour ABP le 2/08/19 6:43

ABP a inventé le concept de rédacteur en chef virtuel en mettant au point un algorithme qui positionne les articles sur sa page d'accueil en fonction de leur popularité. Récemment la revue Terminal a publié un papier sur le sujet . Nous avons pensé interviewer son auteur afin de connaître le cheminement de sa démarche.

[Maryvonne Cadiou] Pourquoi l'ABP est-elle dotée d'un rédacteur en chef virtuel ?

[Philippe Argouarch] Le rédacteur en chef virtuel a été mis en place sur ABP en 2005 je crois, pas longtemps après la création de ce webmédia. On avait alors un système chronologique comme sur les blogs et les sites wordpress. Les articles pouvaient disparaître très vite de la page d'accueil si l'actualité se bousculait, d'autant plus qu'on republiait les communiqués des assos et des partis et que souvent, d'un seul coup, tout le monde voulait donner son point de vue sur l'actualité du jour. Et si 4 partis politiques sortaient un communiqué sur le même sujet, lequel devait-on mettre en UNE ? Il fallait trouver autre chose d'autant plus qu'on n'avait pas de rédacteur en chef salarié.

[Maryvonne Cadiou] Mais comment cela a-t-il pris forme ?

[PA] Quand je travaillais à l'international Herald Tribune à Paris j'avais trouvé choquant qu'une jeune Américaine, juste sortie de l'université, puisse décider toute seule de la photo qui serait à la UNE de la version numérique du journal du lendemain et vue par plusieurs centaines de milliers de personnes dans 140 pays. C'est là que je me suis posé des questions. Google venait de s'imposer comme le moteur de recherche par excellence, il s'était imposé devant les autres moteurs de recherche comme Alta-Vista qui eux n'avaient pas vraiment de mise en page. Google s'est imposé grâce à un algorithme qui détermine l'importance des sites web selon leur référencement.

J'ai donc pensé à mettre au point pour ABP un algorithme tout simple, basé sur la popularité d'un article au moment du chargement de la page par un internaute. En fait ABP a appliqué à la presse ce que Google fait pour l'organisation des résultats de recherches ou ce que Facebook fait pour déterminer votre fil d'actualité. On a appliqué tout çà à la presse. Il n'y a aucune raison que la presse en ligne continue à s'appuyer sur la subjectivité d'un rédacteur en chef qui décide qui ou quoi fera la UNE du journal. La UNE aussi peut être rationalisée et démocratisée comme tout le reste.

[Maryvonne Cadiou] Comment cela marche-t-il ?

[PA] Chaque fois qu'un lecteur décide de lire un article, il clique sur le titre pour charger l'article sur une nouvelle page. Ce clic est enregistré dans notre base de données. Chaque article comporte une colonne totalisant son nombre de lectures. Ces statistiques peuvent aussi être faites par des logiciels comme google analytics que l'on peut ajouter aux pages web mais nous avons notre propre système de statistiques. Pour positionner un article sur la page d'accueil on utilise le CPH (clics par heure) qui est le paramètre obtenu avec la division du nombre de lectures par le nombre d'heures écoulées depuis la parution de l'article. CPH = N/t . Plus le CPH est élevé, plus l'article est positionné vers le haut de la page. La UNE est toujours composée de l'article le plus lu du moment. Avec le temps (t augmentant, le CPH diminue), les articles finissent par disparaître de la page mais le système permet de garder plus longtemps en UNE les articles plébiscités par les lecteurs. D'autres paramètres peuvent être ajoutés pour affiner l'algorithme comme le nombre de partages et de Likes sur Facebook.

[Maryvonne Cadiou] Le système peut-il être hacké ?

[PA] Il l'a été. Au début on collectionnait les numéros IPs pour être sûr de ne prendre en compte qu'un seul clic mais il y avait une faille sur les téléphones portables et le système a été abusé. Un parti d'extrême droite en a profité pour booster ses articles en Une en donnant l'impression que nous étions un média de l'extrême droite. Nous avons aujourd'hui un système bien plus sécurisé qui utilise la signature unique de chaque ordinateur ou appareil connecté à l'internet. Même si une personne a plusieurs appareils ou ordinateurs, le compte des lectures ne peut pas être altéré sérieusement.

[Maryvonne Cadiou] Quels sont les limites de ce système ?

[PA] Les fakenews. Une fausse nouvelle peut toujours faire son chemin comme dernièrement la signature du FCC Nantes d'une charte des derbys bretons. Le FCC Nantes n'aurait rien signé du tout. Le rédacteur en chef virtuel n'est pas capable de déterminer si une nouvelle est fausse ou pas, donc il doit être supervisé. Il peut déterminer quel est le genre de l'article, la rubrique de destination, et le lieu d'une actualité mais il est loin d'être doté d'une intelligence artificielle même embryonnaire. Le sensationnalisme genre tabloïds londoniens peut aussi faire monter en UNE des actualités qui n'en sont pas vraiment, mais, là encore, on doit laisser aux lecteurs le droit de se tromper. Dans cette optique nous faisons très attention aux titres des articles car le lecteur clique ou pas en fonction de ce que le titre induit. Nous essayons d'avoir les titres les plus complets et les plus précis possible mais sans être trop longs. Le public peut aussi sous-estimer une actualité basée sur des préjugés sociétaux, sur la désinformation promulguée sur d'autres médias.

Les articles ont leur propre vie, longue ou courte. Un article passé inaperçu au moment de sa publication peut par contre devenir une référence des années plus tard. Son nombre de lectures continue à augmenter d'une façon régulière. Il est tout à fait possible d'instruire de rédacteur en chef virtuel de ressortir tels articles fondateurs même plusieurs années plus tard, basé juste sur un CPH qui ne voudrait pas mourir.

Voir aussi :
Correspondante ABP depuis février 2007.
Voir tous les articles de de Maryvonne Cadiou
Vos 2 commentaires :
JP. Touzalin Le Vendredi 2 août 2019 18:39
Nous vivons dans une époque ... moderne !
Comme quoi, il ne suffit plus d'écrire et de lire tout simplement ... enfin ... je veux parler du rédacteur en chef.
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Philippe LR Le Samedi 3 août 2019 08:53
Visiblement le robot apprécie beaucoup l'article sur le paiement en ligne d'ABP et le Crédit Agricole. Et l'article sur la génétique est lui passé soudainement de la Une au trépas complet.
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