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- Communiqué de presse -
Taxation des voies express bretonnes : un problème en trompe-l'oeil
Le P-d. g. de Cofiroute, récemment désigné puisqu'il n'a pris ses fonctions que depuis le 18 décembre 2007, vient de créer une vive émotion en Bretagne, en déclarant que l'État gagnerait à élargir le périmètre des concessions routières, y compris le réseau breton des quasi-autoroutes. Il a suscité un tollé général. On assiste, une fois de plus, à la confusion de la cause et de ses effets.
Jean Yves Quiguer pour Mouvement fédéraliste de Bretagne le 3/05/08 16:19

Le P-d. g. de Cofiroute, récemment désigné puisqu'il n'a pris ses fonctions que depuis le 18 décembre 2007, vient de créer une vive émotion en Bretagne, en déclarant que l'État gagnerait à élargir le périmètre des concessions routières, y compris le réseau breton des quasi-autoroutes. Il a ajouté que Cofiroute pourrait réaliser les investissements pour le compte de l'État en se rémunérant soit par l'élargissement de la durée de la concession, soit par l'assujettissement au péage des sections qu'elle prendrait en charge.

Il a suscité un tollé général.

On assiste, une fois de plus, à la confusion de la cause et de ses effets.

Le représentant légal d'une société concessionnaire peut négocier avec un représentant de l'État des documents contractuels portant sur l'exploitation du réseau breton de voies express sans que les Bretons soient invités à s'asseoir à la table de négociation. L'autorité concédante est l'État.

Quand on parle de décentralisation ou de régionalisation, on doit comprendre que les compétences concernées sont fortement limitées à des opérations ancillaires.

Étrange combat breton que celui qui obtient une signalisation bilingue mais qui fait silence sur sa propre gouvernance et celle de son réseau routier.

Le problème n'est pas l'instauration possible d'un péage ; il est, que péage ou non, c'est Paris qui décide, commande et impose.

Si la Bretagne n'est pas un état fédéré des États-Unis de France, elle n'est pas davantage une région autonome. Elle n'est qu'une province, territoire vaincu et vassalisé, hier par la force, aujourd'hui par la ruse de politiques foncièrement jacobines qui font consensus à l'UMP, au PS, au Modem et chez les Verts.

Quel enseignant qui vote Modem ou vert accepte qu'il n'y ait plus d'éducation « nationale » ? Quel postier vert ou modem accepte de devenir contractuel dans une entreprise privée de distribution de courrier qui aurait été retenue dans le cadre d'un appel d'offres effectué par la Région ? Quel agent des Assedic comprend que dans une Bretagne fédérée, le système d'indemnisation du chômage relève d'un contrat d'assurance passé auprès d'une compagnie afin de diminuer drastiquement les frais d'inter-médiation qui pénalisent les chômeurs ?

Cofiroute est lié à l'État par un dispositif contractuel : un contrat de plan pour la période 2004-2008.

La Région Bretagne est aussi liée à l'État par un contrat de projets, ancien CPER (Contrat de Plan État-Région), pour la période 2007-2013.

Au contraire du CPER qui prévoyait des opérations sur les routes, le contrat de projets fait silence sur ce volet qui dépend alors des crédits de droit commun de l'État.

Au moment où la Région entend achever l'amélioration de la RN 164, elle est condamnée au silence sur une option de tarification de ses voies express.

Ce qui est plus cocasse, c'est que le bruit du P-d. g. de Cofiroute et la fureur qu'il déclenche ne sont pas justifiés.

La mise à péage s'inscrit dans un cadre juridique extrêmement contraignant.

Il semble acquis que, pour les déplacements personnels sur le réseau national non autoroutier, la gratuité soit la règle, en corollaire du principe constitutionnel de liberté d'aller et venir.

Aux termes de l'article R122-1 du Code de la voirie routière, (Partie Réglementaire) le classement dans la catégorie des autoroutes : - d'une route nouvelle ou d'une route projetée ; - d'une route nationale existante, est prononcé par décret en Conseil d'État, pris après enquête publique.

Le Conseil d'État vérifie qu'un itinéraire alternatif gratuit demeure ouvert à la circulation. L'itinéraire alternatif parallèle n'existe pas en Bretagne.

Il convient aussi de souligner que le Code de la voirie routière ne prévoit explicitement la perception de péages que sur les seules autoroutes concédées par dérogation au principe de gratuité qui reste la règle. Ainsi plus de 3 000 kilomètres d'autoroutes sont aujourd'hui non concédés, et, partant, nous soumis au péage.

En revanche, il conviendrait de s'interroger sur le réseau de voies express et son impact sur la croissance des résidences principales et sur le développement urbain en général. Comment évoquer le développement durable dans une région où les ménages sont beaucoup plus motorisés que la moyenne française ? Nous avons à répondre à un défi que le CELIB ne pouvait prévoir. L'automobile renforce la péri-urbanisation qui à son tour renforce l'utilisation de l'automobile, dans un contexte de diminution et de renchérissement des énergies fossiles, et aussi dans un contexte d'attention aux modifications climatiques. La substitution d'une énergie par une autre, plus propre, n'est pas la solution idéale car il faut prendre en compte l'émission de CO2 au cours de la fabrication du véhicule. « Une voiture ne roule guère plus de 2000 heures dans sa vie, ce qui est très peu, comparé à ce qu'a consommé sa production », Jean-Marc Jancovici, spécialiste du bilan carbone et consultant pour l'Adme.

Et pour que la fête de l'utilisation de l'automobile soit définitivement gâchée, un autre contexte défavorable vient s'agréger aux deux précités.

Se nourrir va devenir de plus en plus difficile. Après des siècles d'évolution, l'humanité du XXI° siècle va se retrouver à lutter pour sa survie.

Auteur du livre Nourrir l'humanité, Bruno Parmentier, professeur à l'École Supérieure d'Agriculture d'Angers écrit : « Ne croyons surtout pas qu'il suffise de faire le dos rond quelque temps : le problème est structurel. En 2050, il y aura 10 milliards d'êtres humains sur la planète. Or nous aurons, pour les nourrir moins de terres, moins d'eau, moins d'énergie et moins de chimie. En 1960, nous étions seulement deux habitants pour nous partager un hectare de culture. En 2050, nous serons six ».

Un chiffre éloquent : aux États-Unis, premier producteur et exportateur de blé au monde, la prochaine récolte devrait retomber au niveau de celle des années 1950, soit un peu plus de 600 millions de tonnes.

La Bretagne va devoir faire un choix : terrain constructible versus terre nourricière.

En 2004, 11,4 % de l'espace breton étaient artificialisés (8,3 % au plan national) et la progression est très supérieure à la moyenne nationale et à la croissance démographique. Les perspectives démographiques à l'horizon 2030 pourraient conduire la Bretagne à urbaniser environ 100 000 hectares supplémentaires.

Le modèle d'habitat dominant, la maison individuelle, est fortement consommateur d'espace.

Jean Gosselin, architecte DPLG et urbaniste, membre de la commission des sites du Morbihan, affirmait, dans un article du Télégramme du 04/12/2005 que « nous sommes à côté de la plaque depuis plus de 20 ans. » La maison individuelle est liée à l'individualisme prononcé, au rêve de mon château au milieu de mes terres…

Le seul département du Morbihan perd 1 600 hectares de terres agricoles par an au profit d'une urbanisation galopante.

Pollution, consommation d'espace agricole, atteinte à la biodiversité, renchérissement des matières premières, raréfaction de la production : voilà qui devrait inquiéter les Bretons davantage que les billevesées d'un P-dD g. d'une société au comportement par ailleurs critiqué par la Cour des Comptes.

Dans une Bretagne autonome, on ne pourrait exclure de facto un péage par les usagers qui aurait le mérite à la fois de réduire le trafic automobile et de fournir une ressource fiscale.

Les Bretons affectionnent particulièrement l'automobile. Alors on leur construit des routes et des routes mais quid du transport ferroviaire, du ferroutage, du cabotage ?

La région s'obstine dans l'achèvement de la RN-164 sans imaginer une alternative ferroviaire qui viendrait en parallèle doubler l'axe centre-Bretagne et qui ne poserait pas plus de problèmes de génie civil que la création d'une route à chaussée simple.

Que dire de l'oubli du canal de Nantes à Brest ?

L'obsession du désenclavement, l'assujettissement à Paris nous mènent dans des impasses. On dépense des fortunes pour se plier à la tyrannie d'une vitesse qui néglige les territoires traversés en les transformant en no man's land et qui veut faire croire que la liberté bretonne réside dans sa rapidité à se trouver place de l'Étoile.

L'Irlande dont l'économie a connu un développement sans précédent, est-elle moins enclavée que la Bretagne ?

Derrière le sentiment d'isolement et de fermeture comme définition de l'enclavement, se manifeste un obstacle réel : la construction subjective, l'expression du sentiment que le Breton aurait de son isolement, de son enfermement, et l'idée qu'il se ferait de ce que pourrait être sa liberté de déplacement confrontée au constat de ce qu'elle est effectivement.

C'est bien dans nos têtes que nous nous pensons enclavés. Un état spatial, un système territorial portent une dimension symbolique.

La présence au monde du Breton n'est pas objectivée par sa proximité ou son éloignement de la capitale francîlienne. Pour aller de Saint-Malo à Québec, on ne passe pas par Paris.

Quitte à faire sauter la clé de l'enclavement terrestre, ouvrons-nous sur le cœur de l'Europe dont Paris n'est qu'une banlieue éloignée.

Si le développement de l'Irlande ne passe pas par la proximité de Dublin et de Londres, celle du Pays Basque n'a pas rapproché Vitoria-Gasteiz de Madrid.

Les quelques petites minutes gagnées par le TGV à coup de quelques gros millions d'euros sont plus qu'une erreur programmatique et stratégique. C'est une profonde contradiction, car il s'agit bien là de renforcer l'enclavement de la Bretagne en la fermant au monde et en la rendant encore plus dépendante à un moment de l'histoire où l'État-nation tombe en ruines et où Paris n'est plus que l'ombre d'elle-même.

À l'origine étymologique de l'enclavement, on trouve le mot latin clavis, qui signifie la clef, mais aussi le verrou, la barre de fermeture : l'emprisonnement, le blocage. Dans leur Dictionnaire de la géographie (PUF, 1996) Pierre George et Fernand Verger présentent l'enclavement comme une « absence d'accès au marché dans un espace donné ».

Aujourd'hui, le premier espace donné se situe au niveau européen.

Le tout tgv explique l'absence d'autorité sur nos routes.

Il nous faudra moins de temps pour nous rendre à Paris et y recevoir les ordres sur la gestion de notre réseau de voies express.

Le 3 mai 2008

Jean-Yves Quiger

Président du Mouvement Fédéraliste de Bretagne

Voir aussi :
Le Mouvement Fédéraliste de Bretagne plaide et milite pour l'adoption d'une architecture fédérale en Bretagne, en France et en Europe. Membre de l'Union des Mouvements Fédéralistes (UMF), il défend le concept de fédéralisme contractuel dans le cadre des institutions et celui du fédéralisme intégral dans le cadre de la société. LE MFB n'adhère pas à l'idée d'une fédération d'états-nations qui n'est qu'une forme de confédération conduisant aux mêmes échecs que l'actuel état-nation dont nous allons prochainement porter le deuil. C'est ce qui justifie un fédéralisme inspiré de la doctrine contractualiste en opposition avec la doctrine étatiste. Ce qui est bon pour le tout, l'est aussi pour les parties. Il ne saurait exister de fédéralisme européen sans un fédéralisme local, d
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